Maman nous habillait tout bien repassé, quand on y allait.
Tout était joli et bien rangé chez dame Fournier. Et même que par endroits ça brillait. MME Fournier, les cheveux toujours tirés en arrière, aimait bien le mariage du beige et du saumoné, toute une maison décorée avec des froufrous en satin, avec le marbre des cheminées, ça allait bien .
Il y avait même un fauteuil destiné à une poupée aux bras baissés. Elle ressemblait d’ailleurs plus à une marionnette, esclave d’un décor, en total raccord avec les coussins boudins. Personne n’aurait eu l’idée de détrôner ce petit corps de porcelaine, de peur de contrarier la propriétaire de cet endroit. Poupée posée là, à part figée dans sa robe en taffetas, peut-être même de la soie. Quelle idée de mettre une robe de princesse à une poupée qui ne sourit pas !
C’était, d’une certaine façon beau, mais c’était froid .
Dans la salle à manger une vitrine trônait, et dedans ça rayonnait : plein d’animaux et de fleurs miniature en cristal. Tout un univers de glace gelé derrière une prison de verre. C’était mignon d’après la dame au chignon, mais là aussi c’était comme une patinoire, à la fois beau et figé …
Je devais avoir environ 10 ans et, bien entendu, mon regard d’enfant s’imaginait tellement. Mais bon, je savais bien que tout ce petit monde n’ était pas fait pour jouer. Fred mon petit frère avait même peur de lorgner les bibelots Swarosky trop intensément, la peur de casser même en regardant. Maman lui disait toujours de faire super attention ! Rendre visite à Mme Fournier, c ‘était comme marcher sur des œufs. Le frangin ne comprenait pas cette expression , mais il savait qu’il fallait faire super attention. Fred n’avait que 6 ans, et lui était étourdi depuis qu’il était devenu triste. Un drame pour Mme Fournier, si jamais on avait osé toucher un « truc » qui brillait, dans ses yeux le bleu acier se serait accentué . Le regard noir de cette femme était le seul « truc » de foncé dans cette maison sucrier. De toute façon dans cette maison peu d’enfants se sont amusés, à part il y a longtemps, peut-être papa...
Elle avait souvent des friandises pour nous, qu’elle disait cette dame en blanc, aux cheveux punis dans son chignon : Citronnade pour la boisson et dragées vichy, BEURK ce n’était pas bon. Dans la bouche, ça faisait là acide et sec à la fois. Mais pour ne pas contrarier maman nous nous forcions, comme elle nous l’avait demandé dans la voiture sur le chemin, auparavant. Mme fournier c’était la mère de son fils défunt, c’était ainsi qu’elle appelait notre père. Une dame qui ne voulait pas qu’on l’appelle mamé, mais plutôt bonne maman… C’est bizarre, et je n’ai jamais pu la baptiser ainsi, donc je ne l’appelais pas… De toute façon , dans une maison telle que celle-ci les enfants ne parlaient pas beaucoup.
Nous étions tous contractés les dents se serraient, les sourires eux étaient cripsés, il faisait super froid …Trop et toujours assez.
Commentaires
C'est un trés beau texte
pourtant c'est pas mal mamé !! :)